Le Conseil d’Etat a présenté hier son plan financier pour la législature 2022-2026.

Un plan décrit comme «réaliste et ambitieux», qui prévoit 1,28 milliard d’investissements. La priorisation sera le maître mot.

Malgré un recours important aux fonds et aux provisions, le déficit atteindrait 371,6 millions.

XAVIER SCHALLER

CANTON. Le Conseil d’Etat a détaillé son programme de législature le 8 juin dernier. Hier, il était réuni in corpore à l’Hotel cantonal pour révéler le plan financier 2022-2026 qui en découle. Président du Gouvernement, Olivier Curty a expliqué que ce décalage avait permis «d’affiner les prévisions et de prioriser les projets». Au final, l’excédent de charges cumulées se monte à 371,6 millions de francs.

Un fort déséquilibre demeure, donc. «Ce qui est usuel», assure néanmoins le grand argentier Jean-Pierre Siggen. Si ce plan financier est respecté, la croissance annuelle des charges se montera à 2,9% en moyenne, alors que les recettes devraient croître de 1,9% dans le même temps. Pour compenser cet écart, le Conseil d’Etat prévoit de recourir systématiquement aux provisions et aux fonds disponibles. Le prélèvement cumulé pourrait atteindre 623,3 millions.

Vigilance requise

Ce plan financier a été élaboré dans un contexte particulièrement volatil. «Au début de l’année 2022, la situation sanitaire et conjoncturelle montrait des signes encourageants, a rappelé Olivier Curty. Depuis, le conflit en Ukraine a eu des répercussions majeures, notamment au niveau de la croissance mondiale et du risque de pénurie énergétique à court terme.»

Sur le plan national, le conseiller d’Etat cite les incertitudes entourant les revenus de la BNS et la fiscalité des entreprises, à la suite des accords de l’OCDE. Entre autres.

Pour son collègue Jean-Pierre Siggen, le canton devra se montrer extrêmement vigilant, année après année, au moment de l’élaboration du budget. «Mais ces incertitudes ne doivent pas non plus tourner à la paranoïa et nous empêcher d’avancer. J’ai confiance dans notre situation et je pense que l’économie fribourgeoise a montré qu’elle dispose d’un fort taux de résilience.»

Pour atteindre ses objectifs, l’Etat va renforcer ses effectifs. Quelque 469 nouveaux équivalents plein-temps seront créés (lire encadré). «L’évolution de la masse salariale représente, sur la période, près de 50% de la croissance des charges totales», a précisé Jean-Pierre Siggen. Autre domaine gourmand en ressources financières: les subventions.

Elles expliquent à elles seules 37% de la hausse des charges. «Les augmentations sont principalement concentrées sur un nombre restreint de secteurs, tous prioritaires. La mise en œuvre de nouveaux projets a souvent été différée ou alors ceux-ci ont été redimensionnés.»

Projets pas abandonnés

Pour la législature, les investissements bruts atteignent 1,28 milliard. «L’administration générale, l’économie publique, la formation, le trafic, la protection de l’environnement et l’aménagement du territoire concentrent 77% de ces investissements», a détaillé Jean-Pierre Siggen.

La priorisation des projets et l’adaptation des montants étaient nécessaires pour préserver la stabilité financière de l’Etat. «Mais les idées ou projets non retenus comme prioritaires ne sont néanmoins pas abandonnés, a souligné Olivier Curty. Ils pourront être développés en cours de route. Il s’agit aussi de garder une flexibilité pour faire face à l’imprévu et saisir les opportunités.» ■ Soutenir les axes prioritaires

PROJETS PHARES. Le programme gouvernemental 2022-2026 propose trois axes stratégiques: économie et innovation, cohésion sociale, transition environnementale. Lors de la conférence de presse, des exemples concrets ont été développés et chiffrés.

Concernant la première catégorie, un des projets prioritaires est la stratégie d’éducation numérique. Pour mener à bien ce projet, la Direction de la formation et des affaires culturelles (DFAC) bénéficiera d’une vingtaine de postes supplémentaires. «Ils serviront à la formation des enseignants et au soutien administratif et technique, sur quatre ans», a expliqué Sylvie Bonvin-Sansonnens, directrice de la DFAC. Par contre, le coût de l’équipement des écoles «dépendra de la variante retenue». Il n’est donc pas encore connu.

«L’axe 2 du programme gouvernemental touche aux structures de santé et au vivre ensemble, en particulier les personnes les plus vulnérables», a indiqué Philippe Demierre, directeur de la Santé et des affaires sociales (DSAS). Un développement des structures sanitaires est prévu dans deux grands domaines: les institutions et les hôpitaux. «Nous allons par exemple créer de nouvelles unités pour des séjours d’évaluation et d’orientation visant à préparer les personnes âgées à un retour à domicile et ainsi retarder une entrée en EMS.»

Pour augmenter les places en foyer de jour et en accueil de nuit, 1,8 million de francs est aussi prévu. «Par ailleurs, plus de 70 places supplémentaires en foyer et ateliers pour les personnes en situation de handicap sont prévues.»

La mise en œuvre du plan climat va se poursuivre, avec 21 mio pour les 115 mesures. «Avec les efforts dans tous les domaines politiques qui apportent également une contribution significative, comme la stratégie biodiversité ainsi que le plan de mesures phytosanitaires, cela place Fribourg parmi les cantons les plus actifs», s’est réjoui Jean-François Steiert. Le directeur du Développement territorial, des infrastructures, de la mobilité et de l’environnement (DIME), a un autre motif de satisfaction. «Entre le début et la fin de la législature, les moyens à disposition pour la mise en œuvre de la stratégie de développement durable seront multipliés par 4», pour atteindre près de 2,2 mio en 2026. Des moyens supplémentaires sont aussi au menu pour la mobilité durable, avec une augmentation de 10,8% de l’offre de transports publics et un investissement de 40 mio pour les infrastructures cyclables.

Constituant un des axes transversaux du programme gouvernemental, la digitalisation des services se poursuivra, avec une enveloppe informatique en constante augmentation, passant notamment de 58 mio en 2023 à 75 mio en 2025. XS

Près de 470 nouveaux postes

Le plan financier 2022-2026 prévoit 469 nouveaux équivalents pleintemps (EPT), qui expliquent 50% de la croissance des charges sur cette période. «Un renforcement significatif», aux yeux du Conseil d’Etat. «Une goutte d’eau dans l’océan par rapport aux besoins réels», selon le Syndicat des services publics. La police bénéficie de 56 nouveaux postes, en raison de la mise sur pied d’une école d’aspirants et des engagements liés au concept Momentum. L’enseignement dispose de 288 EPT supplémentaires, dont 165 pour l’école obligatoire. Restent 125 postes pour l’administration et les autres secteurs. Moins de six postes de travail par Direction et par année, déplore le syndicat. «Derrière le vernis, on assiste à la poursuite de la politique d’austérité budgétaire», peste le syndicat, qui dénonce aussi «une chute libre du pouvoir d’achat des salariés». Le grand argentier Jean-Pierre Siggen a rappelé que «l’effet brut cumulé de l’indexation, par rapport au budget 2022, est estimé à plus de 93 mio sur la durée du plan financier». XS

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