Pour le médecin cantonal Thomas Plattner, le taux d’hospitalisation est bien plus déterminant que le nombre brut des cas Covid.

La 3e dose est nécessaire pour les personnes à risque, mais pourrait aussi permettre d’augmenter l’immunité des personnes vaccinées.

Un nouveau centre de test rapide sans rendez-vous ouvre à Bulle, à la rue Nicolas-Glasson.

XAVIER SCHALLER

PANDÉMIE. De nombreux pays d’Europe prennent de nouvelles mesures anti-Covid, parfois drastiques. La Suisse, elle, campe sur ses positions malgré une augmentation massive des contaminations. Point de la situation fribourgeoise avec le médecin cantonal Thomas Plattner.

Pourra-t-on éviter une grosse 5e vague, comme on la voit déferler à l’étranger?

Thomas Plattner. C’est difficile à dire. Si l’on regarde le total des cas de la courbe, il est à peu près similaire à la 2e vague de l’automne. Mais avec beaucoup moins d’hospitalisations et ça, c’est clairement l’effet de la vaccination: 69% de la population fribourgeoise a reçu au moins une dose.

N’est-ce pas maintenant qu’il faudrait prendre de nouvelles mesures, avant que la situation n’échappe à tout contrôle?

Le critère numéro 1, c’est vraiment la courbe d’admission aux hôpitaux. Pour l’instant, elle n’est pas si raide. On n’observe pour l’instant pas de surcharge, notamment aux soins intensifs. Ce n’est pas encore la même dynamique qu’il y a une année. Mais si les cas continuent d’augmenter, on court le risque d’une surcharge des soins intensifs. Des mesures sont en discussion.

N’est-ce pas un jeu politique?
Attend-on d’avoir passé le cap de la votation du 28 septembre sur la loi Covid pour agir?

Il faut surtout rappeler aux gens que, plus le taux vaccinal est haut, moins on a de cas graves, et qu’on peut toujours aller se faire vacciner. Le vaccin est vraiment la solution.

Mais la vaccination stagne…

Parmi les personnes non vaccinées, il y a les opposants purs et durs. Mais c’est une minorité. Il y a surtout beaucoup de gens qui hésitent – j’en ai fait l’expérience la semaine passée lorsque j’étais au centre de vaccination pour donner des conseils aux gens. Beaucoup ont encore peur du vaccin, parce qu’ils pensent que c’est quelque chose d’expérimental, qu’on n’a pas assez de recul. Ceux-là, on essaie de les convaincre, parce qu’on sait que le vaccin est sûr. Cela a été prouvé, avec maintenant des millions et des millions de personnes vaccinées dans le monde. Et les vaccins à ARN ne sont pas une nouvelle technologie, ils existent depuis une vingtaine d’années déjà.

La peur d’effets secondaires graves retient les gens. A-t-on connu ça dans le canton?

J’ai connaissance d’un cas d’une jeune femme qui a eu une myocardite, un des effets secondaires très rares associé au vaccin Moderna. Ce cas était d’ailleurs dans la presse. Sinon, je n’ai pas connaissance d’autres cas avec des effets secondaires graves. Ce qui est sûr, c’est qu’une personne court beaucoup plus de risques en ayant la maladie qu’en se faisant vacciner.

On parlait de 80% de personnes protégées pour atteindre l’immunité collective. Ne devrait-on pas y être, en comptant les personnes qui ont eu la maladie?

Avoir des anticorps dans le sang ne veut pas dire être vraiment protégé ou immunisé. On pense que les gens qui ont eu une maladie grave, et qui ont heureusement survécu, ont davantage d’anticorps que ceux qui ont eu une évolution plutôt légère. Donc on ne connaît pas très bien la part des personnes immunisées à la suite de la maladie. On sait en revanche qu’avec une vaccination complète vous êtes mieux protégés. Donc pour l’épidémiologie, on prend en compte environ un million de personnes non vaccinées en Suisse aujourd’hui, parmi lesquelles le virus peut circuler. En tenant compte d’un autre facteur important: les vaccins ne produisent pas une immunité stérile, c’est-à-dire qu’on peut être infecté et transmettre le virus même si on est vacciné.

Est-ce à dire que le taux d’efficacité des vaccins Moderna et Pfizer, annoncé entre 90% et 95%, est moins bon avec le variant Delta?

Le vaccin protège toujours très bien contre une évolution grave de la maladie. Mais avec le variant Delta, la transmissibilité du virus, malgré la vaccination, est plus élevée. Aujourd’hui 25% des cas positifs sont des personnes vaccinées, qui peuvent aussi transmettre le virus.

Y a-t-il eu des gens vaccinés aux soins intensifs?

Oui, mais ils sont minoritaires. Il s’agit plutôt de personnes à risque ou immunosupprimées. Les hospitalisations concernent surtout des personnes plus âgées et majoritairement non vaccinées.

Les médicaments annoncés par Merk et Pfizer pourraient-ils simplifier la gestion, en évitant des hospitalisations?

Oui. Si le traitement commence tôt, nous espérons aussi pouvoir éviter des traitements aux soins intensifs.

Israël et l’Autriche ont annoncé des vaccinations dès 5 ans. Qu’en pensez-vous?

Nous appliquons les directives de la Confédération et notre stratégie de vaccination vise surtout les adultes. Ceux-ci ont plus de risques d’avoir une évolution grave de la maladie. Les enfants à partir de 12 ans peuvent déjà se faire vacciner. Mais, je dirais presque grâce à Dieu, ils ont beaucoup moins de risques de tomber gravement malades. Quant à vacciner de jeunes enfants, qui ont très peu de risques, cela me poserait un problème déontologique.

Qu’en est-il de la 3e dose?

Les études montrent qu’à partir d’un âge avancé, l’immunité commence à diminuer notamment après six mois. Nous l’avons constaté dans les EMS où, depuis la semaine passée et jusqu’à la fin du mois, nous vaccinons à nouveau avec une 3e dose. Il y a aussi la possibilité maintenant d’avoir cette 3e dose au centre de vaccination si on a 65 ans et plus.

Il y a assez de doses en Suisse?

Oui, ce n’est plus la question. Maintenant se pose la question de vacciner également ceux de moins de 65 ans, si les recommandations de la commission fédérale sur les vaccinations le permettent. Jusqu’ici, elle recommande un booster pour les moins de 65 ans, s’ils ont des facteurs de risque très élevés. Il semble que le booster peut vraiment avoir un impact sur la pandémie. Cela a été démontré dans des pays comme Israël, la 3e dose peut diminuer la transmissibilité du virus, permettant d’obtenir un effet très proche d’une immunité stérile. ■

Centre de vaccination du Sud

Depuis octobre, le canton ne compte plus qu’un seul centre de vaccination, à Granges-Paccot. Depuis la fermeture de celui d’Espace Gruyère, qui avait aussi ouvert ses portes le 18 janvier, la Direction de la santé et des affaires sociales dit chercher un nouveau local dans le sud du canton. «Nous sommes en train de négocier, confie la secrétaire générale et chargée de communication Claudia Lauper. Si tout se passe comme prévu, un nouveau centre de vaccination fixe ouvrira à Bulle le mois prochain.» Du nouveau aussi concernant les tests Covid: un cabinet médical proposera, dès jeudi, des tests rapides sans rendez-vous à la rue Nicolas-Glasson. XS

Réseaux

Actualités

Médias

Services

La Gruyère

Actualités

Médias

Services

La Gruyère

«La 3e dose peut vraiment avoir un impact sur la pandémie»

Vous voulez en savoir plus ?

Les bonnes raisons de s'abonner

Dans la même rubrique

Dans la même rubrique

Dans la même rubrique

Dans la même rubrique

Dans la même rubrique

Dans la même rubrique

Derniers articles

Derniers articles

Derniers articles

Derniers articles

Derniers articles

Derniers articles