Le mieux élu de la gauche en 2016, le socialiste Jean-François Steiert vise sa réélection. Il dit avoir remis la DAEC sur les rails. Pour mieux la quitter?

FRANÇOIS PHARISA

Votre bilan en trois points forts?

La politique climatique d’abord. Nous sommes partis de zéro en début de législature et avons depuis élaboré un Plan climat, qui a été adopté par le Grand Conseil avec des ressources financières et des éléments complémentaires dans divers domaines. Deuxième point: nous avons augmenté l’offre en transports publics de 20%. Enfin, un gros travail a été réalisé sur le plan de l’aménagement du territoire. Nous comptions plus de 120 communes avec un Plan d’aménagement local (PAL) non conforme au droit. D’ici à la fin de l’année, deux tiers des cas seront réglés. Ce qui permettra progressivement de clore le chapitre du mitage du territoire dans notre canton.

A propos de PAL, on se souvient que le Tribunal fédéral a tapé sur les doigts de votre Direction. Que feriez-vous différemment si vous pouviez revenir en arrière?

Probablement rien. Nous étions le plus mauvais élève de Suisse. Ça se savait à Berne. Une menace de blocage pesait sur le canton. Il y avait deux options: soit faire du droit transitoire comme nous l’avons essayé, soit écrire aux 120 communes de tout recommencer et d’attendre le Plan directeur pour connaître les nouvelles règles du jeu. Au final, un tiers des communes a gagné, deux tiers se sont retrouvées au même point que si je les avais renvoyées à leurs devoirs dès le début, mais elles n’auraient de toute façon pas pu aller plus vite. Le chemin n’est pas beau je le reconnais, mais personne ne m’en a indiqué un moins mauvais jusqu’à aujourd’hui.

Le Tribunal cantonal vous a en revanche donné raison sur l’affaire des Sattels: la buvette devra renoncer à son parking, malgré le succès populaire qu’elle rencontre. Où placer le curseur dans ce type d’affaires?

D’une part, il y a des choses manifestement illégales, consacrées comme telles par un tribunal. Et d’autre part, il y a des endroits sympathiques qui font plaisir aux gens. La DAEC ne peut pas s’asseoir sur le droit pour contenter tout le monde. Nous sommes dans un Etat de droit. Dans ce genre de cas, j’essaie de mettre les gens autour d’une table, associations environnementales et privés notamment, et je garde à l’esprit de faciliter une offre touristique durable, en concentrant les nuisances sur certains secteurs.

Sitôt qu’ils en ont eu la possibilité, Beat Vonlanthen, Georges Godel et Maurice Ropraz ont lâché la DAEC. Allez-vous les imiter?

Premièrement, il faut être réélu. Deuxièmement, il revient au collège de décider, ce n’est pas chacun pour soi. La DAEC est une Direction difficile de par ses thématiques, mais passionnante de par la marge de manœuvre qu’elle offre. L’inconvénient, c’est qu’il faut une peau relativement épaisse! Je ne l’ai pas reprise dans un bon état, sans doute parce que la durée moyenne d’un conseiller d’Etat à sa tête n’est pas très élevée. Certains services présentaient une importante marge de progression, en particulier le Service des bâtiments. J’ai essayé de recadrer les choses. La DAEC et ses domaines d’activité se portent mieux qu’il y a cinq ans, mais il reste passablement de travail.

Vous évoquez la marge de progression du Service des bâtiments. Il est vrai que les investissements traînent… La faute à ce service?

J’y vois plusieurs causes. Nous avons lancé nombre de projets. Le temps qu’ils se réalisent, en général, prend plus qu’une législature. Donc s’il y a peu d’investissements réalisés, c’est qu’il y a eu peu de projets préparés en amont. Le Service des bâtiments a dû être entièrement réorganisé. Quand je suis arrivé, nous n’avions même pas une liste des immeubles appartenant à l’Etat. La moindre des choses pour pouvoir gérer un parc immobilier de quelque 700 biens.

Ne seriez-vous pas intéressé par un retour à Berne, au Conseil des Etats par exemple?

Je me plais bien au canton.

Finalement, pourquoi voter pour vous?

S’il souhaite quelqu’un qui veut donner plus de poids à la cohésion sociale et laisser un canton en bon état pour les générations futures, il ou elle dispose avec moi de quelqu’un qui tire le canton dans ce sens-là. ■

Entre Fribourg et Berne

Le grand-père maternel a été chancelier de l’Etat de Fribourg, le papa était médecin de famille. Le fruit ne tombe jamais loin de l’arbre. Un intérêt marqué pour les institutions et les questions de politique de la santé ont façonné la carrière de Jean-François Steiert. Conseiller national dès 2007, ce père de deux filles, âgé de 60 ans, qui a longtemps été délégué aux affaires intercantonales du Département de la formation, de la jeunesse et de la culture du canton de Vaud, a compté parmi les parlementaires les plus influents sous la Coupole. Il était loué pour sa capacité à trouver des compromis et sa maîtrise des dossiers, notamment ceux liés à la santé. Il avait auparavant siégé au Grand Conseil (2002-2007) et au Conseil général de Fribourg (1991-2001). Longtemps homme de législatif, il passe à l’exécutif en 2016 en accédant au Conseil d’Etat. Il hérite de la DAEC. «Fier» de son action en faveur de l’environnement, il se plaît à rappeler que son engagement écologique ne date pas seulement de la vague verte, lui l’ex-président de Pro Vélo suisse. Au Gouvernement cantonal depuis cinq ans, il continue de cultiver son réseau bernois. Il préside notamment la Société suisse pour la politique de la santé. FP

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