L’association veveysanne Treebreathe propose des journées de plantation d’arbres avec des bénévoles. Reportage dans la forêt de Mézières.

VALENTIN CASTELLA

ENVIRONNEMENT. Le rendezvous est fixé à 8 h 30 dans les murs de la corporation forestière Glâne-Farzin, sur les hauts de Romont. Un thermos de thé et du café accueillent les bénévoles. Tous sont encore chaudement habillés. Le soleil ne s’est encore pas levé. Il fait froid. Protégés par leurs gants et leur bonnet, les participants se regroupent pour écouter le mot de bienvenue de Lucien Erbetta. Son métier: prendre soin des arbres. On appelle cela un «arboriste». Il se décrit même comme un «arboriste grimpeur».

Agé de 27 ans, le citoyen de Semsales vit pour les arbres et la sensation de sérénité qu’il ressent lorsqu’il s’y trouve au sommet. Alors, afin de prendre soin des forêts, il a créé une association avec sa compagne Mathilde Sonney, 29 ans. Treebreathe a pour but de planter des arbres et des arbustes en compagnie de bénévoles.

Samedi matin, ils étaient une dizaine à boire leur café encore fumant lorsque Lucien Erbetta a pris la parole. Une brève introduction plus tard, tout ce petit monde a grimpé dans quelques véhicules pour se rendre dans la forêt de Mézières. C’est là que le groupe de bénévoles plantera plusieurs dizaines de chênes encore minuscules.

Des conséquences visibles

Devant l’oratoire, les voitures s’arrêtent. Ses utilisateurs descendent quelques mètres à pied avant de faire face à une clairière totalement déboisée. Comme si un malheur s’était abattu sur cette parcelle. Cette calamité se prénomme Chalara fraxinea. Il s’agit d’une espèce de champignon pathogène venue d’Asie qui détruit les frênes. «Nous avons été contraints d’effectuer une coupe forcée, explique le garde forestier Michaël Thomi. Ce champignon a débarqué chez nous en raison du réchauffement climatique.» Le représentant de la corportation Glâne-Farzin accompagne les bénévoles et les membres de l’association en tant que partenaire. Elles sont trois à collaborer avec Treebreathe. Une dans le canton de Vaud, une en Veveyse et donc une en Glâne. «Pour nous, cette relation est positive, reprend Michaël Thomi. Elle nous permet de présenter notre travail et de lutter contre cette image du bûcheron seul au fond de son bois qui coupe des arbres.»

Pour l’association, créée en janvier dernier, ce partenariat est essentiel, car il lui permet de bénéficier de terrains propices à la plantation. La corporation fournit également le matériel nécessaire à la pratique.

D’ailleurs, Lucien Erbetta explique le processus et la manière d’utiliser chaque outil. En premier lieu: faire un trou de quelques centimètres à l’aide d’une pioche. Puis placer le chêne, avant de l’accompagner d’un piquet et d’un tube en plastique. «Cela le protégera, notamment du gibier», explique l’arboriste. Le soleil n’a pas encore offert la moindre miette de chaleur que les bénévoles se mettent au travail.

Certains sont du métier et avancent rapidement. D’autres découvrent. C’est le cas de Baptiste, 16 ans. Il est venu de la Broye vaudoise avec sa maman. «D’habitude, le samedi, je dors à cette heure-là. Mais bon, j’ai souhaité faire une activité. C’est la première fois que je plante des arbres. Préserver la forêt me tient à cœur. Elle était là avant nous, il faut en prendre soin.»

Cédric, lui, officie dans le vêtement de travail à Châtel-Saint-Denis. La forêt n’est donc pas son terrain de jeu de prédilection. Ce qui ne l’empêche pas de mettre tout son cœur à l’ouvrage. Certains s’occupent de faire les trous et planter les chênes, lui est responsable des piquets qui tiendront ensuite les tubes protecteurs en plastique. «Ce qui m’impressionne, c’est que les arbres que nous plantons aujourd’hui seront encore debout dans deux siècles.»

La loi du plus fort

Tous ne survivront cependant pas. Selon le garde forestier Michaël Thomi, entre 10% et 15% des pousses plantées parviendront à traverser les âges. «Au bout d’un certain nombre d’années, quelquesuns prennent le dessus sur leurs voisins. A ce moment-là, il faut leur laisser de la place pour grandir. C’est un peu comme une compétition. Seuls les plus costauds restent.»

En une année, la corporation plante entre 5000 et 7000 arbres. Depuis sa création, l’association suit le même rythme. «Lors d’une journée, chaque bénévole plante entre 80 et 100 arbres.». Enfin, les rayons du soleil se sont frayé un chemin entre les arbres de la forêt de Mézières. Il est 10 h 30, tout le monde est au travail. Bientôt, un champ défriché retrouvera une seconde jeunesse en accueillant des dizaines de pousses. Mathilde Sonney observe, et sourit: «Ça fait du bien de voir le bonheur que procure le travail en communauté. En plus, nous sommes en pleine nature et nous en prenons soin.» Elle conclut: «Les bénévoles ne se baladeront plus en forêt de la même manière. Ils connaîtront mieux cet environnement et le protégeront. Ces journées permettent d’avoir une autre vision de la nature.» ■

Se développer encore

La journée de plantation de samedi était la quatrième organisée par l’association Treebreathe. Au total, depuis le début de l’année, celle-ci a planté environ 7000 arbres. Dans quelques jours, elle accompagnera les écoliers de Siviriez. Une septantaine d’élèves seront pris en charge par Mathilde Sonney, Lucien Erbetta et Michaël Thomi. Cette sensibilisation est également effectuée auprès des entreprises. «Cela forge l’esprit d’équipe», décrit la présidente de l’association. Fondée en janvier et basée à Semsales, cette dernière devrait se développer à l’avenir. C’est en tout cas le souhait de la jeune maman. «L’objectif est d’organiser de plus en plus de journées de plantation.» Son ami complète: «Pour cela, nous devons encore convaincre d’autres corporations qui nous permettraient ainsi de bénéficier de davantage de terrains.»

Ce sera le travail de Julien Erbetta, qui est en contact régulier avec les corporations. Lui-même officie en tant qu’indépendant au sein d’une société qu’il a également créée en janvier dernier. «Je fais des soins aux arbres, des plantations et des tailles. Et puis, je propose un système de sciage qui permet de donner une seconde vie aux arbres.» Ce bois se retrouve ensuite dans la boutique en ligne du couple, qui vend notamment des bracelets ou des hôtels à insectes. VAC

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