Inculpée pour l’assassinat d’une fille âgée de deux ans et demi, une Gruérienne de 28 ans se retrouve depuis hier devant le Tribunal pénal de la Gruyère.

Niant les faits, elle a accusé son ancien petit copain et père de la fillette.

Le procès se poursuit mardi et mercredi avec la présence d’experts, le réquisitoire et les plaidoiries.

VALENTIN CASTELLA

JUSTICE. «Je ne l’ai pas tuée, et je ne sais pas comment vous le faire comprendre!» Dans une salle du tribunal pleine, une Gruérienne de 28 ans a affirmé ne pas être à l’origine du décès d’une petite fille de deux ans et demi, tuée en novembre 2018 à Vuadens. Son procès est prévu jusqu’à mercredi.

Face à la présidente du Tribunal pénal de la Gruyère Frédérique Bütikofer-Repond, la prévenue, accusée d’assassinat, subsidiairement de meurtre, a nié les faits. Ce ne serait pas elle qui a donné des coups à la fillette avant de l’empêcher de respirer dans la nuit du 10 au 11 novembre 2018, alors qu’elles se trouvaient seules les deux dans une villa (lire cicontre).

«Il faut que je me casse»

Sans trembler et avec un ton plutôt cassant, elle a répondu aux questions de la présidente, qui lui a d’abord demandé de définir sa relation avec la petite fille. Selon son ami de l’époque, elle la «détestait». Elle a certifié qu’elle avait «toujours pris en compte» la présence de la fillette, avant de déclarer: «Ce n’était pas mon rôle de la garder. Je ne voulais pas endosser ce rôle de bellemère.» Par message à une amie, elle avait écrit quelques heures avant le drame: «Il faut que je me casse, je ne suis pas faite pour vivre cette vie.»

Elle a complété en affirmant qu’elle ne participait pas aux activités avec son compagnon et sa fille. «Souvent, il l’installait devant la télé. Je lui ai fait des reproches sur son attitude envers moi et elle.»

Le déroulement de la nuit du drame a ensuite été le sujet de l’audition. La prévenue affirme que la fillette ne s’était pas manifestée. Alors que, quelques heures plus tôt, les parents certifiaient que leur enfant se réveillait souvent la nuit. Frédé- rique Bütikofer-Repond a alors rebondi: «Comment se fait-il que vous ayez été réveillée par la sonnerie d’un message à 2 h 40, mais que vous n’ayez rien entendu lorsqu’une fille subissait des violences à l’étage?» Réponse de la Gruérienne: «Le natel était sur mon matelas et je me trouvais sûrement dans une phase de sommeil plus légère.»

Le lendemain matin du drame, alors que le père de la petite fille s’étonnait qu’elle dorme encore à 10 h, elle lui aurait conseillé de la laisser tranquille. Ce qui a inspiré cette question à la présidente: «Souhaitiez-vous être partie avant que le père ne découvre le corps?» Elle a répliqué: «Non, car je ne pouvais pas le savoir.»

Frédérique Bütikofer-Repond a rétorqué: «Elle est morte à la suite de l’intervention d’une personne. Et ce n’était pas quelqu’un provenant de l’extérieur.» «Ce n’est pas moi», a répété l’accusée.

«Il allait trop loin»

Selon elle, le père pourrait être à l’origine du décès. Une hypothèse qu’elle a soumise lors de sa sixième audition: «Il pourrait clairement être le coupable, car il allait trop loin avec sa fille.»

Dialogue intense

Cette première journée s’est conclue par un dialogue d’une rare intensité entre la présidente et l’accusée:
– Je n’ai rien fait.
– Qui l’a fait alors?
– C’est lui.
– Mais vous étiez présente.
– Je n’ai rien entendu, je n’ai rien vu.
– Elle a tout de même reçu trente coups… ■

«Je suis toujours dévastée»

Des paroles emplies de douleur ont été exprimées par les parents de la petite fille décédée en 2018, lors de la première matinée du procès. «Psychologiquement, je travaille tous les jours, car j’ai promis à ma fille que, un jour, je serai heureuse», a expliqué la maman.

Ne pouvant retenir ses larmes, elle a continué: «Je suis toujours dévastée. En plus, on est coincés dans cette histoire judiciaire. On doit sans cesse ressasser ce qui s’est passé cette nuit-là. J’attends que ce procès se termine pour pouvoir simplement penser à ma fille, qui était curieuse et joyeuse. J’aimerais que justice soit rendue, car elle ne méritait pas ce qui lui est arrivé.» Assis à quelques mètres, le papa a semblé également très ému lorsqu’il a dévoilé le récit de cette fameuse nuit. Il a dit être revenu à la maison à 3 h 15. «Lorsque je suis entré dans la chambre, j’ai demandé comment la nuit s’était déroulée. Elle (n.d.l.r.: la prévenue) m’a dit qu’elle s’était bien passée. Nous avons ensuite entretenu une relation sexuelle, avant de nous endormir.»

Il a découvert le corps sans vie de son enfant le lendemain, vers 10 h 30. «Elle n’était pas dans son lit, j’ai regardé d’un côté et de l’autre et je l’ai vue étendue par terre. J’ai crié “non, non, non!” Je suis allé vers elle, je l’ai couchée sur le flanc et j’ai compris que c’était fini. J’ai alors pris mon téléphone pour appeler les secours.»

Reprenant son souffle, il a poursuivi: «J’ai envie de revenir en arrière pour éviter ce drame. Je vis chaque jour en pensant à ma fille. Je n’arrive pas à faire le deuil. Je m’en veux tellement de ne pas l’avoir protégée.»

Ce n’est que onze jours plus tard, lorsque la police a arrêté la prévenue à son domicile, que le Gruérien a appris que le décès de sa fille n’était pas accidentel. «Le ciel me tombait une deuxième fois sur la tête. Je ne pouvais pas y croire et accepter que la personne que j’aimais ait pu faire du mal à ma fille.» VAC

Le résumé

Une Gruérienne de 28 ans, détenue provisoirement à la prison de la Tuilière, à Lonay, depuis novembre 2018, est accusée d’assassinat, subsidiairement de meurtre. Selon le Ministère public, elle ne serait pas parvenue à se maîtriser face à la fille de son ami de l’époque, âgée de deux ans et demi.

Alors que la prévenue et la fillette étaient seules à la maison une nuit de novembre 2018, elle s’en serait prise verbalement à l’enfant, qui s’était réveillée vers 1 h. Elle aurait ensuite exercé de la violence physique à l’encontre de la petite, l’empêchant notamment de respirer. Ce qui aurait provoqué des lésions ayant conduit à la mort. Le père n’était pas présent à ce moment-là. Il est revenu à son domicile vers 3 h 15 et il est allé se coucher. Ce n’est que le lendemain, vers 10 h 30, qu’il aurait constaté le décès de son enfant. VAC

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Accusée d’assassinat, elle nie les faits: «Je ne l’ai pas tuée»

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